Nancy Adjani, la cinéaste qui monte en flèche

Son obsession pour le cinéma lui aura permis de devenir une cinéaste qui monte en flèche. D’actrice à productrice, Nancy Adjani mène une carrière remplie d’abnégation et de courage pour une femme rd-congolaise brillante et talentueuse.

Peau d’ébène et toujours aussi charismatique, elle ne cesse d’éblouir sur scène grâce à son jeu d’actrice subtil qui vaut son pesant d’or. Un savoir-faire qui lui a permis d’être sur le devant de la scène grâce à « Adjani », le film qui lui a fait productrice pour la première fois réalisé par Julio Lolo et qui a pu décrocher le Prix Canal+ de meilleur long métrage au Festival AG’NA 2022 au Mali.

Assidue et talentueuse, l’ex-actrice de la série télévisée Collywood qui vit une meilleure ascension, voit des choses en grand pour l’avenir. À l’occasion du mois de la femme, Eventsrdc.com l’a interviewée dans sa chronique “les femmes s’expriment”.

Vous venez de remporter le prix Canal+ du meilleur long métrage pour le film Adjani lors du festival AG’NA au Mali, comment avez-vous accueilli cette nouvelle ?

C’est une nouvelle incroyable ! C’était magique parceque quand le réalisateur m’a appelé, j’ai dû me trouver au bureau d’une entreprise de la place et je ne pouvais même pas dire un mot, j’attendais et il me dit : « Nancy bonne nouvelle ». Il a pris quelques minutes pour me dire, c’était un suspense, je tenais à ce qu’il crache le morceau sans attendre. Après il m’a dit « Nancy on a obtenu le Prix Canal+ », j’ai dit que ce n’est pas croyable mais je ne pouvais pas crier, je me suis réservée. Ensuite quand j’ai fini avec les personnes avec qui j’étais, je suis allée aux toilettes et j’ai crié et je lui ai dit que c’est pas possible mais il m’a confirmé qu’on a bien remporté le prix avec une somme d’un million de FCFA. C’était incroyable !

Comment avez-vous vécu cette première expérience en tant que productrice du film « Adjani »?

En tant que productrice ce n’était pas du tout facile, c’était quelque chose que j’ai commencé comme ça au hasard, je ne m’y attendais pas. C’est quelque chose que je ne conseille pas si vous n’êtes pas assez prêts. Si vous êtes prêts, faites-le. Mais j’encouragerai toujours les gens, si vous pensez que c’est possible, faites-le. Du moins, c’était une grosse expérience, il y avait tellement eu des imprévus. J’avais déjà un budget fixé et après il y aura tellement d’autres choses qui vont surgir, des accidents…toutes ces choses que vous n’avez pas en tête qui vont venir et que vous devez y faire face. Donc, c’est une grosse expérience pour moi.

En tant qu’actrice, comment le monde extérieur vous voit-il ?

Il me voit comme toutes ces actrices qu’on voit à la télé. C’est que dans mon entourage on m’appelle la star mais j’ai encore un long parcours. Il me voit comme une artiste qui arrive à donner quelque chose de spécial, d’inattendu, comme toutes les autres artistes qui s’y donnent à fond.

Comment se présente votre filmographie à l’heure actuelle ?

C’est vrai que j’ai joué dans « Jeu Mundele », le film de Kadhafi Mbuyamba sorti en 2020, une très belle expérience également, mais après « Adjani » il y a d’autres films qui vont sortir cette année notamment « Butu » de Kevin Fox. Mais mon tout premier film c’est celui d’Irène Vaweka « Un diable dans ma vie », entre 2011 et 2012. Mais j’ai joué dans les séries TV notamment avec la troupe Collywood depuis 2009. Ça fait aujourd’hui 13 ans que je suis dans le milieu cinématographique. J’ai joué dans une vingtaine de séries.

Vous êtes actrice et productrice, rêvez-vous aussi de passer derrière la caméra ?

Vous savez c’est toujours important d’embrasser une partie de profession en tant que réalisateur ou réalisatrice parceque la plupart de fois l’honneur revient beaucoup plus aux réalisateurs. C’est très important pour moi. J’en ai parlé une fois à mon ami Éric Kayembe que je voudrais une formation en tant que réalisatrice. Mais pour l’instant il y a plusieurs réalisateurs qui veulent faire leur part et donner le meilleur d’eux-mêmes. Il faudra aussi les soutenir aussi bien financièrement que moralement. On a tant de réalisateurs, on veut faire les choses petit à petit.

Pensez-vous que c’est facile pour les femmes de pouvoir s’imposer dans un secteur cinématographique qui souffre du manque d’industrie et où les hommes dominent?

La preuve vous avez « Adjani » qui a été produit par une femme. Ce n’est pas une mission impossible, c’est faisable. D’ailleurs je suis une productrice qui vient de se rajouter dans la lignée d’autres. Il y en a beaucoup dont une que je connais vraiment bien Clarisse Muvuba. Donc je connais beaucoup de productrices qui se donnent à fond. C’est vrai que les hommes dominent dans ce milieu cinématographique, ce n’est pas facile mais en tant que femme guerrière je pense qu’il faut se battre.

Après « Adjani », que préparez-vous pour les cinéphiles ?

Après « Adjani » il y a d’autres projets mais nous préférons être discrète pour l’instant. Pour l’instant on préfère encore promouvoir « Adjani » qui a encore beaucoup à donner, beaucoup à montrer. Mais entre temps en coulisses on fait des choses.

Quel est selon vous le rôle de la femme dans le cinéma ?

Le rôle de la femme dans le cinéma c’est de faire rêver, de donner le meilleur d’elle-même, de prouver qu’elle est capable de réaliser de grandes choses. Une fois j’ai vu un documentaire des années 60, deux dames ont montré la voie à la chronique musicale, Maman Angebi et Maman Kanzaku. Je pense que le rôle de la femme c’est aussi de donner une inspiration, de montrer la voie, de montrer que nous sommes capables de faire des choses par nous-mêmes. C’est vrai que je suis un petit peu féministe mais s’il y a un homme qui voudrait aussi me soutenir, pourquoi pas mais il faut aussi être reconnaissant, dire que telle ou telle autre personne m’a aidée, m’a donnée un coup de main. Je pense que c’est aussi important que les femmes donnent une image positive, celle qui va perdurer toute la vie. « Adjani » c’était un projet. En tant que femme, je pouvais peut-être faire un voyage à Dubaï ou acheter une voiture mais j’ai préféré faire un projet à long terme. Faites-le pour le long terme.

Quelles relations gardez-vous avec vos anciens camarades de Collywood ?

Collywood Cinéma c’est ma famille, on ne s’est jamais séparé. J’y ai fait mon intégration en 2009, c’était grâce à mon grand-frère Daddy. Jusqu’aujourd’hui nous sommes toujours en contact. Je vais vous raconter une anecdote. Quand le réalisateur m’a parlé des acteurs qui devaient jouer dans « Adjani », je lui ai dit : « Je suis désolée mais je vais jouer avec ma famille ». Collywood c’est ma famille, ce sont des personnes avec qui on a galéré. Un moment, on allait aux séances de répétition à pied, on rentrait à pied sans même avoir de quoi manger, mais quand on était sur scène, on avait l’impression d’être des Supermen, des Superwomen. Le film « Adjani » c’est 95% des collywodiens.

Comment voyez-vous l’avenir du cinéma rd-congolais ?

Le cinéma congolais existe. C’est juste qu’il faudra mettre du sérieux. On est très mal réputé dans notre pays pour ce manque de sérieux. Ça existe mais mettons du sérieux, et aussi que notre gouvernement nous soutienne aussi. Le Nigeria, la Côte d’Ivoire, le Sénégal par exemple, ils sont soutenus par leurs États, et pourquoi pas nous ? Pourquoi on doit demeurer dans un stade où on doit quémander de l’attention, de l’argent ? Ils ne se rendent pas compte mais le cinéma fait aussi entrer de l’argent comme le fait la musique. Il faudrait juste qu’ils croient en nous, qu’ils nous donnent des moyens possibles afin que nous réalisions de grandes choses. Si je suis arrivée à faire « Adjani » aujourd’hui c’est peut-être parceque si on attendait le gouvernement, ça n’allait pas être aussi prêt. Je pense que c’est d’une part et d’une autre, on attend le gouvernement, mais ne croisons pas les bras. S’efforcer toujours à faire des choses merveilleusement bien.

Un conseil à toutes ces femmes qui rêveraient un jour de devenir cinéaste comme vous

Le sérieux. J’ai toujours dit aux gens d’être sérieux, mettre du cœur. Ne faites pas du cinéma parceque vous voulez à tout prix qu’on vous voit à la télé. Moi en réalité je n’aime pas quand on me regarde, je suis très timide de nature et je n’aime pas qu’on me fixe les yeux. Mais quand je suis sur scène, je deviens quelqu’un de différent. C’est de la patience. Quand vous sentez que vous êtes passionné par le cinéma, faites-le, vous sentez que vous avez du talent, faites-le valoir. Ne restez pas à attendre qu’on vous dise ce que vous devez faire, faites-le maintenant. Montrez au monde que vous êtes capable de réaliser des choses, inspirez-le. Venez faire du cinéma parceque vous l’aimez, parceque vous vous sentez prêtes et passionnées, mettez du sérieux. Mettez de côté tout ce qui est harcèlement, sexe et sachez dire non.

CHADRACK MPERENG

Pour tous vos voyages à l’étranger. Ph.Dr.Tiers