#RDC : Sony Kamana plaide pour la création d’une industrie textile

L’homme à plusieurs casquettes, Sony Kamana a laissé plus d’empreintes dans le secteur de la mode et du mannequinat où il évolue depuis 1993. Soucieux de l’émergence de ce domaine qui, selon lui, est porteur de devises et d’emplois, Kamana a lancé un appel patriotique auprès des responsables du pays à prendre des mesures conséquentes afin de protéger la main d’œuvre nationale. Il a accordé une longue interview à Eventsrdc.com au cours de laquelle il a retracé sa carrière, a décrypté les problèmes gangrenant le secteur de la mode et a parlé de son agence, « Eclipse ». « Personnellement, je pense que c’est la politique qui freine le pays. Elle s’impose partout et ne fait rien », a-t-il lâché. Nous vous proposons un premier extrait de cette longue interview. 

L’élégantissimo Sony Kamana. Ph.Dr.Tiers

Qu’est-ce qui empêche les mannequins et autres acteurs du monde de la mode congolaise à convaincre le monde entier ?

Ce qui nous empêche, c’est une espèce de coup de pousse. Nous sommes le seul pays où il n’existe pas des mécènes. Je joue plusieurs casquettes. Je suis coach, patron d’agence, manager, financier… Alors que si j’ai un appui du gouvernement, des mécènes ou des partenariats avec les entreprises commerciales nous irons très loin. Avec ces difficultés, nous arrivons quand même à placer des mannequins à l’international -aux  USA, en France, en Chine… Il est vrai qu’ils ne sont pas trop bons ou top, mais ils peuvent parler de la RDC et dire que nous sommes le pays de la mode, de l’élégance et de la sape.

 

Malheureusement, la nation n’a  rien à foutre avec notre démarche. Chez nous, c’est plus la politique. Un tout petit peu, le football. Je travaille avec les stars de la musique qui se plaignent et se battent avec leurs propres moyens. Nous devons avoir des industries textiles, mais elles n’existent pas. Nous devons avoir un grand nom ou une ligne vestimentaire, des vêtements inter-congolais, mais qui tardent à venir. En parlant de l’industrie, je ne vois pas seulement les mannequins. Je vois aussi, les bijoutiers, maroquiniers, les coiffeurs, les cordonniers, les journalistes, les professionnels des médias et autres. Personnellement, je pense que c’est la politique qui freine le pays. Elle s’impose partout et ne fait rien.

Le célèbre Sony Kamana entouré de quelques mannequins de son agence  » Eclipse « . Ph.Dr.Tiers

Pouvez-vous nous citer quelques mannequins qui défendent valablement la RDC à Paris, à Tokyo, à Milan, à New-York et dans d’autres grandes villes du monde ?

Les mannequins ne restent pas là-bas. Ils partent et reviennent. Je cite Tania, Roland, Mamadou, etc. Ils n’ont pas encore atteint le top. Mais, ils ont franchi ces murs-là et sont montés sur les grands podiums. Jusque-là, nous les affrontons en complicité avec les stylistes.

 

Qu’est-ce qui manque à ces mannequins pour devenir réellement top model ?

Ce sont les opportunités qui nous manquent. Nous avons tous ce qu’il nous faut. Nous formons plus par rapport à ceux de New-York. J’ai beaucoup de projets qui demandent des moyens pour organiser des pré-castings ici au pays. C’est-à-dire préparer des mannequins  pour  être utilisés ailleurs. Je fais des sélections qui permettront aux grands événements de venir puiser ici et ces mêmes têtes défendront valablement la RDC ailleurs. Il y a Audrey qui venait de participer à un concours de beauté en Chine. Il y a d’autres qui vont en Amérique latine et en Afrique. La formation des mannequins est comparable à celle des footballeurs. Il faut investir pour gagner dans le futur. C’est toute une industrie pour former les mannequins hommes ou dames.

 

Pouvez-vous tenter une aventure avec les entreprises commerciales ?

En RDC, ces entreprises ne nous facilitent pas la tâche. Et pourtant, nous sommes appelés à faire leurs promotions ou leurs communications pour qu’elles doublent ou triplent leurs chiffres d’affaires. Vous remarquerez qu’elles organisent des publicités avec les visuels -affiches ou vidéos-  comportant les visages des mannequins étrangers. Ce sont  les choses que l’État doit interdire pour nous permettre de bien exercer notre travail.

 

Dommage. Il n’y a aucune interpellation. Même à l’interne, nous sommes concurrencés par nos compatriotes qui ne recourent pas aux mannequins professionnels et préfèrent sous-traiter les neveux et nièces. Nous espérons qu’un jour les choses changeront en bien.

CINARDO KIVUILA