Tribune: Adieu l’ami Lutu Mabangu, un des monuments de la télé congolaise

La vie est faite des arrivées et des départs. Arrivé au monde fait plaisir le quitter engendre la tristesse. Toute séparation, en règle générale, charrie son lot de douleurs. C’est exactement ce que je ressens en pensant à Eleuther Lutu Mabangu qui vient de tirer sa révérence à l’âge de 76 ans, le 29 juillet à Tours (France) où il résidait depuis 2010.

Comme j’en ai fait une habitude, je convoque ma mémoire pour qu’elle me restitue les circonstances dans lesquelles je l’ai connu. C’est d’abord comme téléspectateur à travers une émission agenda « Le carrousel kinois », une sorte d’almanach culturel donnant des programmes de cinéma vers les années 70. Puis, je le retrouve réalisateur en 1975 de la tranche 15/18 avec comme présentateurs Benoît Lukunku Sampu et Vital Tiembe, aidés dans la manœuvre par Octave Juakali Kambale dans les installations de Renapec devenu par la suite Ratelesco.

Moi, faisant mes premiers pas dans le sillage de la presse, en qualité de stagiaire. Nos chemins vont à nouveau se croiser en 1992 lorsque je deviens co-producteur d’émissions et acheteur/vendeur des programmes et je produisais une tranche sportive « Prolongation » et des séries télé dont la célèbre « Dona Beija ». Lui, est directeur des programmes. En 2004, lorsqu’il m’a été confié les charges de conseiller au ministère de l’Information et Presse, lui est devenu le coordonnateur de la nouvelle RTNC 2 (chaîne de développement) où est logé le cabinet du ministre.

Et, en prévision des élections, je co-produis avec lui l’émission « On en parle ». Et, de ces différentes rencontres, une amitié s’est développée. Nous nous voyons régulièrement, partageant des moments agréables autour d’un verre. J’ai eu un gros pincement au cœur, en apprenant qu’il a été arrêté, en avril 2009, pour une histoire montée de toutes pièces. Il s’en est tirée avec une forte dégradation de sa santé, affaibli et bien malade. C’est à la suite de tout ça que son frère va le faire monter en Europe pour des soins que nécessitait son état de santé. Il restera près de dix ans hors du pays et loin de ses activités professionnelles. Dieu merci, en 2016, la nation s’est montrée reconnaissante à son égard en lui décernant une distinction de mérite national pour récompenser ses loyaux services rendus.

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Eleuther (le seul que je connais portant ce rare prénom) que comme j’appelais affectueusement « Lettre » pour faire court, est un vrai professionnel de la première heure de notre télévision qui fête ses 54 ans.

Un des pionniers, s’il en est. Ses différentes initiatives ont marqué les esprits exerçant sa tâche avec une débordante passion. Il est l’un de tous premiers réalisateurs et à son actif, on lui doit des émissions telles que « En plein vent », « Télé show », « Le bidule », « Kin show »…

Ayant bénéficié d’une bonne formation en Europe, de la même veine que Kayumbi Beya (Théo Boniface) et Lukunku Sampu. Ils étaient tellement liés qu’on appelait ce trio Kalulu (Kayumbi-Lukunku-Lutu).

Que des souvenirs inoubliables ! Je n’oublierai jamais notamment la mise en forme du générique du JT ayant incrusté l’image du président Mobutu dans les nuages d’où, il sortait comme descendant sur terre. Du grand art à l’époque où la télé, encore analogique, ne connaissait pas encore le boom technologique d’aujourd’hui. Adieu l’ami Eleuther !

JEAN PIERRE EALE IKABE (CP)