À Kinshasa, le “Décalé” dame le pion aux génériques

Hier marginalisé, le « Décalé » made in DRC a aujourd’hui du vent en poupe à Kinshasa damant le pion aux génériques.

Chaleur incalculable, rythme endiablé, lyrics rudimentaires et refrains simples, sarcastiques et humoristiques, telles sont les caractéristiques du Décalé rd-congolais. C’est bien loin d’être un style de profondeur et de l’élégance ni une musique de l’âme. Le but principal est de créer une ambiance et une joie de vivre. Pour certains, le Décalé peut bien servir d’exutoire.

À l’heure de la libre expression, la musique diversifie les méthodes. Du rythme à la forme, le langage conquiert la liberté. Le choix de la musique qu’on écoute décrit notre culture, notre langage, notre mode de vie, nos apparences, notre quotidien. « Si on veut connaître un peuple, il faut écouter sa musique », disait Platon. Empreinte de diversité, la société rd-congolaise aime désormais des musiques résilientes mais évolutives. Elle est celle qui adopte un genre et le rend populaire.

À Kinshasa, le bouillonnement musical fait rage. Entre préservation des valeurs musicales traditionnelles et exotisme, les artistes musiciens du pays font valoir leurs méthodes. À une époque, on ne pouvait parler de l’ambiance kinoise sans faire allusion aux génériques, ces chansons au rythme ensorcelant qui introduisent généralement les albums rd-congolais. Mais aujourd’hui, la force du générique est fragilisée l’OVNI Décalé, très apprécié par une grande partie des amateurs kinois de la chanson.

Aux bars, dans les clubs, aux stades de foot, sur les réseaux sociaux, ce style poursuit son ascension fulgurante. La majorité de kinois s’identifie désormais à un genre qui malgré tout divise.

Le Décalé, expression nouvelle ou dépravation des mœurs ?

La musique adoucit les mœurs. Elle est un pilier de l’éducation artistique. Sauf que le langage qu’on adopte peut détruire ou pas des générations. D’où, la responsabilité leur incombe dans le choix d’écoute.

En RDC, le Décalé divise. En dépit de sa popularité beaucoup plus à Kinshasa, certains rd-congolais ne cautionnent pas une musique qui selon eux “contribue à la dépravation des mœurs et favorise la délinquance”. Pour d’aucuns, c’est une musique des “Kulunas” qui n’a aucune leçon morale. Ils estiment que ces chanteurs du Décalé viennent juste d’enfoncer le clou d’une société déjà abrutie par le paroxysme de l’ignorance et où la bêtise pense.

Une épée de Damoclès au-dessus de la tête pour les bambins qui, malheureusement écoutent très souvent ces chansons en boucle. Une irresponsabilité des parents remise en cause eu égard à leur laxisme dans la rigueur éducationnelle.

Les génériques et le manque de créativité de la nouvelle génération

Les chansons génériques captivent de moins en moins les amateurs rd-congolais de la chanson comme ce fut le cas il y a quelques années. Les animateurs sont-ils aujourd’hui moins inspirés ? Ont-ils perdu leur génie et leur maestria ?

Hormis les chansons rumba, les génériques mettent de l’ambiance et donnent le tempo de chaque album rd-congolais. À l’époque des rudes concurrences Werrason – JB Mpiana ou Papa Wemba – Koffi Olomide, les génériques avaient une saveur royale et un pouvoir conquérant. Malheureusement aujourd’hui, la baisse de régime dans l’investissement de l’excellence est palpable dans le chef des artistes musiciens.

Le manque d’inspiration et de créativité des animateurs est un fait, mais surtout il faudra mettre à l’actif l’absence du goût aujourd’hui dans le chef des orchestres de faire des génériques. Problème de générations ? L’actuelle a-t-elle une bonne culture musicale pour aimer les génériques que ses devanciers ? Autant de questions tauradent les esprits des amateurs de la chanson.

L’avenir des génériques dépend surtout de la préservation de la tradition par les musiciens et de sa consommation et sa valorisation par le public.

CHADRACK MPERENG